Phase test

"MMhh. Si j'ajoute de l'ADN de lynx et de chat sauvage pour le gène VI III, je devrais facilement atteindre les 22 dixièmes aux deux yeux.", marmonnait Maya Rosenfeld.

Se saisissant de son matériel de manipulations génétiques, Maya utilisa se précédents prélèvements d'ADN de félins pour les mettre en culture dans quelques bactéries.

*Ne reste plus qu'à les tester. La descendance d'Igor fera l'affaire...*

Ayant déjà des cellules receveuses et de l'ADN à disposition, Maya quitta la longue paillasse sur laquelle elle travaillait déjà depuis ... 10, 12 heures ? Elle ne comptait plus.

Attrapant une énorme femelle rate noire dans une des cages grillagées, elle réalisa un implant de cellules à l'ADN modifié.
Dans trois semaines, son équipe allait pouvoir vérifier si les petits rats ainsi créés avaient ou non une si bonne vue que dans les prévisions de la scientifique.
Car son nouveau projet, plus que novateur en soi, mais finalement dans la continuité de ses "petits travaux", ainsi qu'elle aimait les appeler, nécessitait bel et bien des expériences et des test approfondis avant d'être appliqués sur des êtres génétiquement créés.

Se tirant de ces rêveries de créatures programmées à loisir pour diverses missions au service des Dantclas, Maya rangea tout son matériel, vérifia soigneusement que les cages à rats étaient fermées, déclencha la sécurité anti-intrusions dans le labo et sortit de la pièce.

Elle allait pouvoir prendre un café, avaler un sandwich, et sans doute piquer un petit somme si rien ni personne ne la dérangeait (ce qui arrivait plus fréquemment qu'on ne pourrait l'imaginer...)

"Mais que fout ce p*tain de mec ici ?" me direz-vous. Je vous répondrai : il a ses raisons, il est majeur, et il vous dit zut. Anchang se trouvait dans la cité universitaire par sa simple volonté et pour des causes ne regardant que lui, bien que je ne garantisse pas qu'elles respirent la pureté... Bref, il squattait là il il n'avait semblait-il rien à faire, et plus précisemment aux laboratoires, passant de salle en salle, regardant ce qui s'y faisait avec la plus grande curiosité, et saluant les quelques connaissances qu'il y trouvait.

Il déboucha alors dans un couloir, non par hasard puisqu'il connaissait assez bien le bâtiment, le regard dans le vide, complètement perdu dans ses pensées.

*Ca serait intéressant... Mmmmh ouaiiiis... Héhéhé, c'est une idée à reprendre...*

Soudain, un choc le tira de ses pensées. Il venait de percuter quelqu'un. Tout gentleman qu'il était, il s'inclina légèrement (reste d'habitudes pris chez les Onoris) et se confondit en excuses.

"Excusez-moi mademoiselle, je ne faisais pas attention, je vous prie d'accepter mes plus humbles excuses, je ne vous avais pas vue, j'espère ne pas vous avoir fait mal..."

"AOuuUccHHH"

Maya venait de répandre ses papiers par terre, et en plus, elle allait avoir un gros bleu à l'épaule, là où le coude du type s'était retrouvé littéralement encastré. Un instant elle fut tentée de a) se répandre en insultes sur ce malotru ou b) jouer les victimes en simulant une atroce souffrance.

Mais la 1ere option était trop grossière pour lui aller, et Maya avait trop de fierté pour mettre la 2eme en pratique.
Alors elle redressa ses lunettes, se baissa pour ramasser ses papiers tout en maugréant :

"MMMhhh...ça va, ça va ... C'est plutôt pour ma paperasse que ça m'ennuie voyez-vous..."
Voyant qu'il s'apprêtait à l'aider à tout rassembler, Maya ajouta précipitamment :
"Merci, ne vous donez pas cette peine. Je vais tout ramasser moi-même."

[color:e4ce=défaut]*Manquerait plus qu'en plus, il voie les documents concernant mes travaux...*

Lorsqu'enfin elle eut tout remis en place, et bien au chaud dans sa besace, Maya s'autorisa à regarder à quel collègue ou malheureux laborantin elle avait affaire. L'homme était de type asiatique, assez classe, et lui était rigoureusement inconnu.

*Mais...mais en plus, il n'est pas du labo !*

"Dites ! Je vois que vous ne faites pas partie du staff ! Je vous prie de me dire qui vous êtes : nous sommes dans un centre de recherche, comme vous le savez, et vous n'avez rien à faire ici sauf contrordre !"

Ne manquait plus que ça ... on laissait entrer des étrangers maintenant !! Ah, ces vigiles...

Au refus de la jeune femme, Anchang se ravisa de l'aider. Il ne lui en fallait pas plus, même si ça pouvait n'être que par politesse, il ne se faisait pas prier, et attendit sagement qu'elle ait tout rangé dans sa besace. A la voir manipuler si soigneusement ces bouts de papier, le jeune homme en jugea qu'il devait s'agir de documents d'importance, mais ne s'attarda pas sur cette curiosité. La spécialité de cette partie n'était pas l'informatique, mais la création d'êtres vivants, et ça n'était pas un sujet qui l'intéressait pour l'instant.

"A vrai dire, j'ai quelques relations avec le directeur de l'établissement, ce qui, il faut l'avouer, est assez pratique pour entrer facilement... Comme quoi, ça paye d'être en bons termes avec quelques personnes hautes placées ^^ Et les raisons pour lesquelles je suis ici ne regardent que moi, mademoiselle, je ne vous ai pas questionné sur ces papiers auxquels vous semblez tenir ^^"

Ca c'était de l'argumentation à la Anchang. Il répondait sans répondre, cachant la vérité, l'une de ses spécialités... Toujours souriant, il s'inclina légèrement en avant par signe de politesse, puis se redressa.

"J'en oublie les bonnes manières. Mon nom est Li Anchang, enchanté, et encore désolé de vous avoir percuté, j'étais perdu dans mes pensées..."

Ce type pouvait toujours s'excuser, pensa Maya, il n'en reste pas moins un intrus, et à la limite de la fatuité en plus !

"Maya Roche Rochefeld. Et je suis directrice du département de génétique.
Ce qui me donne le droit de vous expulser immédiatement dudit département, dans lequel vous êtes visiblement entré sans pass.
Je tiens en outre à vous préciser qu'étant membre du personnel, et en outre à un poste plutôt respectable, je n'ai en aucun cas à me justifier devant le cas que je fais de mes documents !
Je vais donc vous prier de sortir de cette aire de recherches, car même si vous étiez effectivement proche du Directeur, ce dernier ne vous laisserait pas davantage pénétrer dans le quartier le plus sécurisé du bâtiment !"

D'ailleurs, Maya était fort intriguée : il fallait être plutôt blindé en informatique pour entrer dans ce coin ... entre les alarmes, les digicodes, les vidéosurveillances, tous supervisés par un ordinateur central extrèmement bien gardé, Li devait être performant pour avoir tout désactivé de la sorte.
Et Maya s'intéressait aux gens qui, dans leurs domaines, étaient justement talentueux.

C'est pour cela qu'elle s'adressa à lui d'un ton plus aimable :

"Enfin je dois avouer une chose : vous m'épatez. J'aimerais que vous me disiez quels talents informatiques vous ont permis un tel tour de force. Et pour cela, je vous propose un café."

Quittant l'aire des recherches, Maya Rochefeld emmena Li Anchang vers la cafétéria, où, à cette heure, l'on servait de la (?) "nourriture".

Anchang s'inclina à la présentation de ladite mademoiselle -ou madame ? Aucune idée- Rochefeld, par pure politesse et tradition lui restant du clan qu'il avait trahi. Directrice du département génétique ? Si elle pensait que ça suffirait à appaiser la curiosité de l'asiatique, elle se trompait sur toute la ligne, et autant dire que c'était pas la dernière... Toujours souriant, il ne semblait absolument pas prendre en compte les dires de son interlocutrice vis-à-vis du fait qu'il n'avait rien à faire ici. Mais sa remarque attira son oreille, et fit discrètement s'élargir son sourire.

"Et bien, pour tout vous dire, j'appartiens à la Soul Society, ce qui est l'endroit idéal pour parfaire ses capacités en informatique..."

Et bien c'était dit... Pourquoi dissimuler qu'il en était le directeur ? Tout simplement parce-qu'on ne le lui avait pas demandé, voilà tout. Se saisissant du bras de la demoiselle -sans gêne x)-, il lança d'un ton tinté d'amusement.

"Je ne puis refuser une invitation d'une si charmante personne ^^"

Charmante ? Il se foutait d'elle, oui !! Ce type devait être un dragueur invétéré, ou alors être sacrément intéressé (par ses travaux...) pour lui sortir un truc pareil... à elle, la petite intello toujours bien planquée derrière ses lunettes !
Maya n'avait jamais été qualifiée de la sorte, si bien qu'elle ne savait pas comment prendre le "compliment"...qui la troublait bien plus que ne l'indiquait son visage resté froid, malgré un rapide coup d'oeil sarcastique à Li.

"C'est cela, c'est cela... Que prendrez-vous ? Je vous laisserai passer votre commande."

Il étaient arrivés devant le robot distributeur d'aliments. Maya, sans attendre la réponse de son compagnon, pianota son choix sur l'écran de commande : un cappuccino bien tassé, un sandwich mozzarella-tomates séchées-basilic et un brownie aux noix.
Laissant Li commander son repas,elle chercha des yeux une table pour deux, sous le regard curieux et amusé de quelques collègues traînant là.

Quand il l'eût rejointe, Maya entamma la conversation.
"Soit. Une société informatique, disiez-vous ? ^Quel post ? C'est que vos compétences me semblent assez impressionnante, à moi, pauvre néophyte..."

Le temps était agréable ce jour là... Une petite brise rafraichissait l'atmosphère sèche et gorgée de soleil de la ville. En bref tout aurait pu être très agréable si il n'avait pas à se rendre dans ses maudits laboratoires... Celui qui pensait cela n'était autre que Kageru-san, qui malgré son tempérament calme était plutôt grincheux en cette journée d'été. Il fallait pourtant bien qu'il y aille dans ces laboratoires, le clan tenait à ce que sa création reste en forme.

Après deux mois environ d'existence, il devait en effet passé une série d'examen afin de vérifier qu'aucune compliquation post-création n'avait eut lieu. Ce genre d'incident arrivait parfois chez les chimères... Tout peu sembler normal à la base et puis après une certaine période à évoluer à l'extérieur comme tout individu normal si on puit dire, des maladies du type déficience imunitaire se développaient parfois. On avait donné un nom à ce phénomène et l'appellant le syndrome VIH retardé... Une nouvelle forme qu'avait prise le SIDA en fait et à laquelle était particulièrement sensible les chimères même si on ne savait pas encore comment cette anomalie pouvait se développé chez certains sujets et pas chez d'autres quand les deux ont subit la même procédure de création et vivent après de manière équivalente...

C'est donc avec cette épée de damoclès au dessus de sa tête que Kageru se rendit dans la cité universitaire, il espérait que les résultats seraient négatifs car... Oui il voulait vivre. Traversant les allées bien propre et verte du campus, il marcha rapidement vers la section de la Néocorp. Il devait retrouver là bas Maya Rochefeld, celle qui l'avait conçu... L'idée était moyennement enthousiasmante car elle le voyait comme un produit et c'était quelque chose d'assez dérangeant.
A l'acceuil de la firme il ne fit pas de manière, plus vite il serait fixé et mieux ça vaudrait... Plantant son regard rouge sang dans celui noisette et un peu anxieux de la secrétaire il se fit très clair,

"Je veux voir Mlle Rochefeld au plus vite... S'il vous plais."
"Heu... C'est l'heure de la pause et je pense pas qu'elle..."
"Elle est où?"
"Elle doit surment être à la cantine de l'entreprise mais..."
"Et c'est par où?"
"Ah non vous ne pouvez pas y aller, il faut que vous preniez un numéro et on vous appel..."

Kageru ne l'écoutait plus, la regardant, cette fille sans doute trop fidèle à la conception administrative pour faire une exeption. Pouvait-on lui en vouloir dans le fond, sa vie devait être morne derrière ce comptoire... Inutile de faire de scandale, les hommes de la sécurité serait là pour intervenir, non il fallait juste se la mettre dans sa poche... La sortir de sa monotonie...

"Ecoutez Mademoiselle..." commença-t-il d'une voie suave.
"Madame , trancha-t-elle sèchement, Vous prenez un numéro et vous attendez votre tour."

L'être chimérique resta silencieux, haussant très haut ses sourcils dans une expression interdite qui ne lui allait pas. Il observa la secrétaire et devant son air glacial et catégorique adopta cette fois une moue ennuyée et quelque peu insolente.

"J'ai horreur des connes." balança-t-il enfin en s'éloignant du comptoir pour aller tirer sèchement son numéro à la borne... 112... Un regard vers l'affiche holographique de la salle d'attente... 87...

*Raaah je suis pas sorti...* pensa Kageru en se laissant tomber sur une des chaises en plastique.

Maya, sans attendre la réponse de son compagnon, avait entammé avec entrain son sandwich.
*Délicieuses, ces tomates, décidément. Enfin ces tomates... cet assemblage d'ADN conduisant à des cellules qui imitent à la perfection ce que les agriculteurs d'autrefois se tuaient à cultiver.*

Souriant à ces persepctives incroyables que l'innovation avait, voilà déjà un temps, permises, Maya continua à mastiquer sa pitance. Mais à peine en était-elle à la septième bouchée qu'une de ces secrétaires de l'accueil, chignon vulgaire et rouge carmin aux lèvres, vint lui tapoter l'épaule, signifiant ainsi qu'elle avait à lui parler.

"Docteur Rochefeld, sussura la niaise, le sourire mielleux laissant présager le pire. Il semblerait que vous soyiez attendue. Un rendez-vous inattendu apparemment. Il s'agit hihi d'une-euh chimère-euh. Très presséééée."

"Vraiment ? " répliqua froidement Maya, le sourcil levé, tentant de réprimer l'exaspération qui montait en elle. Ces cruches, avec leurs voyelles stupidement prolongées en fin de mots et leurs allusions putrides, finiraient par avoir raison d'elle...

"Et une chimère impatiente est-elle une raison nécessaire, ou du moins suffisante, pour que j'interrompe mon repas ? Ou plutôt, que vous vous permettiez de l'interrompre, Pamela ?"
Voyant le visage ultra poudré de l'idiote se décomposer dans une moue grotesque de stupidité, Maya en profita pour ajouter
-En outre, pourriez-vous, au lieu de sous-entendre de graveleux ragots, me communiquer la raison de cette visite urgente en mon laboratoire ?

-Ben, elle n'a pas précisé ! Elle avait juste l'air pressé et j'ai pensé que... balbutia l'abrutie, une moue pathétique sur sa figure grossièrement peinturlurée

-Non, Pamela, vous n'avez pas pensé justement ! Comme toujours !!! Vous venez m'importuner avec des bêtises au lieu de me dire ce que cette chimère, qui a peut-être besoin de soins urgents, ou que sais-je ?! Bref, à quoi bon tenter de vous expliquer quoi que ce soit, vous ne comprendrez pas et me la referez la prochaine fois...

Un rapide au revoir à son compagnon d'un très bref repas, et sans le laisser répondre elle le planta pour bousculer d'un geste du bras Pamela, qui, pantelante, la regarda s'éloigner, soufflée par la busquerie de la répartie du jeune médecin.

Elle emprunta le couloir qui menait à l'accueil des consultations, puis, toujours aussi délicatement, défonça d'un geste rageur la porte qui menait à la salle d'attente...87.
La chimère l'attendait en effet, avec impatience car le sursaut provoqué par l'ouverture de la porte l'avait directement propulsé en station verticale, prêt à la suivre en consultation.
Maya réprima un hoquet de surprise en découvrant son patient. Elle ne fréquentait évidemment pas les chefs de clans, mais conséquemment à sa présence dans certains...cercles, elle avait subrepticement aperçu Yaro, qui régnait sur les Onoris. Eh bien, son visiteur en était devenu l'exacte réplique, jusqu'aux piercings qui ornaient l'oreille de la chimère.
Par politesse et par décence, donc, elle avait caché sa surprise en voyant le patient.

"Bonjour Kageru. Que me vaut cette visite semblerait-il de la plus grande urgence ?"

Et la chimère avait intérêt à fournir une réponse digne de justifier l'interruption de son repas par une niaise, alors qu'elle bossait aujourd'hui au centre de recherches...

Il avait commencé à compter les dalles de plastiques ornant le plafond de la salle d'attente (une par une sinon c'est pas drole et non pas en multipliant le nombre de la largeur par le nombre de la longueur...) quand la secrétaire revèche l'interpella au travers d'un interphone bien glacial et mécanique. Il lui était demandé expressément de se rendre dans la salle untel d'examen. Kageru se leva lestement et passant devant le comptoir de réception lança un rictus à la bonne femme qui le fusillait du regard, cela avant de se rendre dans un couloir aussi asceptisé que blanc où une farandolle de portes aux jolis chiffres impersonnels. Il alla vers celle qu'on lui avait attribué, entra pour tomber dans une des ces salles proche de l'univers hospitalier qu'il avait vu dans l'une de ce nombreuses séries TV sur la vie trépidente des médecins. Médecins plus ou moins sadiques au passage... Il imagina très bien la tête de son futur soigneur? Laborantin? Pfff... C'est du pareil au même! Enfin bref il l'imagina tel le sadique refoulé qui n'attendait qu'un patient pour pouvoir jetter son diagnostic acerbe et venimeux à souhait... Diabolique...

Et là le diable en personne surgit! Non en fait... Mais Kageru piqua un fard en voyant arrivé Maya Rochefeld sa bien aimé (hum...) créatrice. Il nota qu'elle avait étouffé une légère ou pas surprise derrière une moue convenue. Il haussa un sourcil en pensant avec un cynisme non feint qu'elle n'aura pas l'audace de lui lancer qu'il avait grandit tout de même... Ce serait de très mauvais goût.

"Bonjour Kageru. Que me vaut cette visite semblerait-il de la plus grande urgence ?"

L'être chimérique ne cacha nullement quant à lui sa surprise vis à vis de la question de la scientifique, le bon sens professionnel aurait voulu qu'elle soit au courant de son dossier médical, elle devait être payée pour aussi et grassement alors merde. Décelant en surplus une certaine impatience doublée d'un regard peut être naturellement hautain chez l'humain, l'être chimérique ne se géna point pour faire part de son incrédulité...

"Quo vadis? Vous n'êtes pas au courant de la douleur qui m'inflige... Quid est cur un tel laxisme? J'ai reçu une petite lettre dans ma petite boîte aux lettres qui m'informait que... Je devais passer une batterie d'examens afin de savoir si par pur hasard je ne développerais pas des anomalies post-création."

Il dégagea une de ses mèches blanchâtre en prenant une attitude navré,

"Quid plura, je suis là et comme vous... J'attends."

"Soient pendues les secrétaires stupides et incompétentes...", avait murmuré la chercheuse au propos de Kageru.

Toujours aussi grandiloquente et blasée, cette chimère... voilà qu'elle lui sortait du latin. Mais qui étudiait encore cette langue, depuis des millénaires inusitée ?

Quand elle l'avait conçue, Maya n'avait pas songé à intégrer des dispositions particulières pour les lettres, ni quelque autre discipline que ce soit. Elle n'avait même pas envisagé le fait qu'elle puisse un jour revoir Kageru.
Voilà pourquoi son apparence la surprenait : ça n'était après tout que la deuxième fois qu'elle le voyait fini, et elle se félicitait intérieurement d'avoir réussi un si beau boulot. Sans compter les acquis de la créature, manifestement désireuse de s'approprier un vaste savoir.

Nonobstant, elle n'en était pas moins inconsciente de la vie des labos…

D’un signe de la main, elle invita Kageru à passer la porte qu’elle avait précédemment ouverte avec la délicatesse d’un bulldozer pour le mener à une salle d’examen.

Etouffant une (nouvelle) bouffée d’exaspération, elle répliqua d’un ton où la froideur tenait plus du professionnalisme que de l’énervement :

« Laxisme ? Il semblerait que vous ne puissiez, si je puis me permettre, juger ou non de la qualité des services prodigués par notre Laboratoire, Kageru. En l’occurrence, puisque vous semblez attendre une justification, il se trouve que, n’ayant pas été affectée aux soins et au suivi depuis plus de dix mois, je ne suis pas très au fait des infections et autres déficiences touchant les chimères, clones, etc.… que j’ai pu créer ces derniers temps. »

Ils étaient arrivés dans un cabinet, muni d’un lit d’examen, de matériel médical de bases et d’une batterie d’appareils d’examen aux noms tous plus barbares les uns que les autres, et dont la délicate nuance rappelait celle que prenait le fruit des entrailles de qui avait abusé de substances fermentées

Toujours d’un geste, elle signala à la chimère qu’elle pouvait ôter son haut, et, une fois ceci fait, en un éclair, lui désinfecta le creux du coude et s’arma d’une seringue qu’elle piqua rapidement mais délicatement dans la veine de la créature.
Le prélèvement sanguin effectué, elle plaça l’éprouvette dans la centrifugeuse qu’elle mit en route, et, pendant les trois minutes que prenait la machine pour réaliser ses tests, elle expliqua plus en détail à son patient :

« Mais évidemment, je sais qu’en effet des « anomalies post-création » peuvent se déclarer, comme vous le dites, au bout de quelques mois d’existence. Et le peu de temps que j’ai passé au suivi ces mois-ci ne m’empêche pas de connaître la nature exacte de ces troubles. »

Tel le médecin récitant sagement sa leçon, et dans le but de mettre au fait Kageru tout en le rassurant sur ses compétences, elle débita sans forfanterie aucune :

« Il se trouve que le système immunitaire des organismes créés artificiellement, même s’il est soigneusement pensé, peut, du fait de sa fabrication dans nos laboratoires hautement sécurisés et aseptisés, se révéler inadapté, dans de rares cas, à la vie en extérieur. Pourquoi cela n’arrive-t-il pas aux humains me direz-vous ? Hé bien tout simplement, ainsi que Darwin le proposa il y a des siècles, que dis-je… bref, l’espèce humaine, tout comme toutes les espèces animales auxquelles nous avons laissé la vie, a évolué, s’adaptant aux conditions environnementales. Celles-ci incluant les diverses affections, tant virales que bactériennes, que le système immunitaire a appris à reconnaître. Les humains sont donc plus aptes à résister à moult affections, entre autres, grâce à cette immunité acquise.
Si nous en revenons aux chimères, dans le cas qui nous occupe, nous avons détecté une forme de VIH, sans doute due aux conditions artificielles de fabrication du sang et surtout du sérum, le liquide contenant les cellules responsables des mécanismes immunitaires. »

Ce discours fait, le léger bourdonnement de la centrifugeuse s’était tu. Toujours aussi rapidement et de ses gestes précis, elle ouvrit le compartiment contenant l’éprouvette, s’en empara, referma le clapet, fit tourner la machine et lança l’impression de la feuille-bilan des analyses.

« Bien. Nous aurons vos résultats dans une ou deux minutes encore. Ceux-ci obtenus, je vous examinerai quand même, car une des phases du virus peut ne pas être révélée au terme du bilan sanguin. En attendant, si je puis me permettre, avez-vous des problèmes de santé particulier, ou quoi que ce soit qui nécessite une expertise médicale ? »

L'odeur des produits chimiques et pharmaceutiques, tout comme l'ambiance générale dans cette pièce, tout rappelait à Kageru la période durant laquelle il avait dut séjourner ici et pendant laquelle il ne connaissait encore rien du monde réel, un séjour aussi court que désagréable. Il regarda et écouta Maya décrire la procédure sans commenter, comme la dernière fois, la scientifique s'avérait d'une glaciale amabilité. Tout cela aurait pu le laisser froid si il n'y avait pas en jeu sa santé, le regard sanguin de la chimère se posa sur la centrale d'impression de façon assez vive, il répondit machinalement à l'humaine.

"Non... Pas vraiment, il me semble pour ma part que tout est normal."

Son regard devia sur celui de sa providencielle... Mouai... Soigneuse. Il avait évolué depuis qu'il était sortit et elle avait dut surement le remarquer. Non seulement Kageru se forgeait une personnalité mais en plus il paraissait bénéficié d'un tempérament plus libre et moins soumis que ce que le programme de création avait prévu, ce dernier point était évident et plutôt contrariant... Finalement on ne pourrait en faire n'importe quoi de cette chimère.
Mais voilà que la feuille finissait d'être imprimée, Kageru arracha le papier assez sèchement sous le regard outré de Mlle Rochefeld qui ne devait pas apprécier que l'on prenne ses aises dans son domaine. Il parcourut l'écriture informatique et sentit un noeud se dénoué avec allégresse au niveau de son estomac, et pour cause, les résultats étaient négatifs, Kageru était parfaitement sain. Un sourire vint même éclairer son visage qui s'avéra assez séduisant sous cet angle.

"Alea Jacta Es... Je crois que je vais habiter ce monde pour un certain temps, surtout si on tiens compte du fait que je vais vivre vieux, enfin... Façon de parler n'est ce pas."

Il évoquait sa capacité à se régénérer qui par ailleurs n'allait pas tarder à se mettre en place d'ici peu sous forme de mue... Un don incroyable qui faisait que tout comme son modèle, il ne vieillirait pas et conserverait une même apparence jusqu'à la fin de sa longue vie semi reptilienne... Si jamais évidement il ne lui arrivait pas de pépins d'ici là, entendons par là un accident ou non de nature violente.
Cette idée était néanmoins loin d'éffleurer l'esprit de Kageru en cet instant, il était trop content d'être en bonne santé. Sautant du lit d'examen, il colla une bise à Maya avant de s'en allé dans le couloir en chantonnant, la laissant coite de surprise et peut être même plus.